Mme K boit toujours autant

L'amie de Mme K la regarde boire sa bière. Mme K parle depuis une demi-heure, elle explique qu'elle préfèrerait être Gandhi plutôt que Mme K. Mme K s'imagine que sublimer son agressivité peut rendre très heureux. Plus généralement, Mme K souhaiterait vivre dans un monde plus simple et moins méchant - et puisqu'il faut bien que quelqu'un commence, elle souhaiterait être elle-même plus simple et moins méchante. Mme K voudrait des amis emplis de bonté, et surtout moins emplis d'eux-même afin qu'elle-aussi, Mme K, puisse se vider de toutes les pulsions tournées vers son centre. Mme K voudrait se concentrer sur son travail, non sur les autres et leurs attaques, encore moins sur elle-même et ses problèmes.

L'amie de Mme K la regarde boire sa bière. Elle dit : « Mme K, tu ne penses pas assez à ce que tu dis. Comment peux-tu croire que tu peux devenir plus simple et moins méchante, alors que tu ne parviens pas même à boire moins ? » Cela coupe la chique à Mme K qui avale une grande lampée de bière puis repose son verre devant elle en soupirant. « Je te connais, (c'est Mme K qui parle), tu n'as pas parlé pour ne rien dire ou simplement pour dire quelque chose - tu as dit des choses que tu pensais, je les prends au sérieux mais je ne les comprends pas ; moins boire me rendra-t'il plus simple et moins méchante ? » L'amie sourit : « Cela n'a rien à voir avec la quantité de boisson. Par contre c'est un comportement que tu aimerais changer depuis des années; or tu n'y es pas arrivée. Et il est tellement plus facile de moins boire que de moins penser à soi ! » Alors Mme K commande une autre bière en pensant que même les amis honnêtes et bons peuvent être dangereux, lorsque l'on n'est pas à leur hauteur.